« Pour Nadia Beugré, il s’agit de reconsidérer certaines paroles trop souvent négligées : danser veut aussi dire cicatriser. » Isabelle Danto
Depuis plus de dix ans et son premier solo où elle revendiquait l’occupation des espaces interdits aux femmes, la danseuse et chorégraphe ivoirienne Nadia Beugré foule les scènes internationales.
S’attaquant aux codes de la féminité, de la masculinité et du regard occidental posé sur les corps noirs, elle interroge le poids du passé colonial dans des pièces fortes qui explorent les représentations de la marge, des rôles assignés, des rôles choisis et assumés. D’Abidjan à Montpellier où elle a créé sa troupe Libr’Arts en 2020, c’est toute une écologie des relations qu’elle met ainsi à l’œuvre, à travers une danse engagée, sans provocation. Pour ce nouveau solo, elle repart vers le pays natal, non plus à Abidjan mais du côté du village de ses aïeules Yikakou, village qui l’a vu grandir et qui n’existe plus. Car entre Nadia et Beugré, il y a en réalité le nom Gbahihonon, « la femme qui dit ce qu’elle voit », figure grand maternelle qui lui a légué son nom, une femme puissante et détentrice de savoirs qui protégeait la petite communauté.
Habitée par cette voix et d’autres voix de femmes, entre mémoire collective et souvenirs, Nadia Beugré s’entoure de deux musiciennes conteuses. Toutes deux se font l’écho de ce témoignage intime, de cette réparation mémorielle qui réintègre des personnes disparues et une histoire meurtrie. Pour Nadia Beugré, il s’agit de reconsidérer certaines paroles trop souvent négligées : danser veut aussi dire cicatriser.
+ d’infos :
Direction artistique et interprétation : Nadia Beugré
Durée : 1h
Image : ©Kader Lassina Touré
