Un spectacle dansant à fleur de peau.
Le 4 août 2020, le port de Beyrouth est soufflé par deux explosions. C’est le coup de grâce pour Sérénités, un trio de Danya Hammoud commencé en 2018. Il y aura eu les révoltes libanaises à partir d’octobre 2019, puis la pandémie impliquant la poursuite du travail à distance, et finalement cette déflagration. Une des danseuses ne pourra jamais rejoindre les deux autres. En lieu et place de cette création initiale, Sérénités était son titre s’empare de toute cette histoire et nous raconte avec finesse et subtilité un état du monde, de nos sociétés et de l’urgence de créer. Malgré tout. Soulignant à quel point il est essentiel de se donner la liberté de repenser une création. La traversée d’une tragédie, étape complexe comportant simultanément des tensions contradictoires, des élans et des suspensions, des ruptures, des découvertes et des accidents, sujet de Sérénités, reste latent. Comme une pièce fantôme qui irriguerait la nouvelle et survivait dans ce duo entre danse et récit. La danse montre alors tout son potentiel de résistance, opposant sa force vitale et fondamentale, avec ses torsions et ses tourbillons, témoignant par son silence et ses cris étouffés de « mort, perte, disparition, séparation », comme l’explique Danya Hammoud sur scène… Tout en nous livrant mieux que personne une ode à la vie. Agnès Izrine
